Cher.e.s vous tou.te.s,
En voilà un titre annonciateur de beaucoup de choses… Mais ne vous y méprenez pas, c’est bien d’alimentation ou plutôt d’alimentation dans son caractère politique dont nous allons parler ici.
Comme je vous l’ai annoncé dans mon explication sur ce qu’est “l’alimentation conscience”, si on se contente de parler de nourriture, d’aliments, de santé et de poids lorsqu’on parle d’alimentation, on passe complètement à côté du sujet. Hé oui, résumer l’alimentation à ces sujets reviendrait à limiter notre vision de la complexité des choses à un prisme si petit que nous n’en délimiterions à peine les contours. Si on veut se libérer de ses comportements alimentaires délétères, il faut aller bien plus loin et parler de systèmes.
L’alimentation est politique
L’alimentation est politique, la sphère privée lorsqu’on est une femme est politique et j’espère que pour vous aussi cela ne fait plus aucun doute.
Notre rapport à l’alimentation est codifié par le monde qui nous entoure. La seconde guerre mondiale dans un premier temps, qui a sortie les femmes du foyer et de leur cuisine car, en l’absence des hommes, l’économie avait besoin d’elles pour “produire, soigner, prendre en charge” et qui les a renvoyées dard dard dans leurs chaumières lorsque les hommes sont rentrés. La révolution industrielle ensuite, qui a permis de faire rentrer des machines dans les foyers et dans les cuisines et ainsi faciliter certaines tâches ménagères et qui a vu l’alimentation de collectivité et la restauration prendre leur essor. Et la révolution féministe également qui a demandé au système qui nous entoure d’octroyer des droits aux femmes comme ceux de voter, faire des études, travailler… (Ce résumé est bien trop court pour représenter le poids de l’histoire mais vous voyez où je veux en venir).
Avec tout cela, si les femmes ont pu accéder à certains privilèges de la société et à un début de liberté, il reste encore beaucoup de travail à faire pour pouvoir se dire qu’on vit dans un monde égalitaire. En effet, l’éducation des filles et des garçons, dès le plus jeune âge est toujours ancrée dans la dualité homme/femme avec une vision sexe fort et sexe faible. Si les femmes prennent leur place dans le monde économique et politique, elles n’en restent pas moins bloquées à certaines étapes par ce qu’on appelle le plafond de verre et les écarts salariaux. Et si les femmes donnent de leur temps à la société capitaliste pour obtenir une certaine liberté financière, la charge du collectif (mentale et émotionnelle), elle, est toujours majoritairement portée par les femmes plurielles, la balance de répartition du temps invisible n’ayant pas été égale à la balance du temps de travail.
Oui, nous parlons ici d’une injustice systémique. Et je ne vous ai même pas encore parlé de pression sociale, de perfection, de la notion d’être une “vraie” femme ou une “bonne” femme, des injonctions à la maternité et du bénéfice de la parentalité pour les hommes versus celui pour les femmes, du poids qui pèse sur les femmes enceintes et leur alimentation car comme la médecine le dit “C’est dans le ventre de la mère que tout se passe”, du poids de la comparaison entre femmes et de l’intérêt que notre système a à nous diviser… Tout un poème. On y reviendra évidemment.
Alimentation et systémie
Pour en revenir à notre titre, en fait, ce dont je voulais vous parler c’est du patriarcat, le nom que la sociologie a donné à notre système qui a été fondé sur cette notion justement de “sexe fort” en comparaison au “sexe faible” et qui a vu se modeler une société faite par les hommes, pour les hommes.
Et ce dont je voulais vous parler aussi, c’est du livre de Pauline Harmange qui dans ce titre “moi les hommes, je les déteste” assume sa misandrie haut et fort qui se révèle au fil des pages être sa colère vis à vis de l’injustice ressentie au quotidien, du fait de vivre dans ce système patriarcal en tant que femme. Oui nous utilisons “les hommes” pour parler de ce qui nous semble injuste, oui nous savons qu’il existe des exceptions, des mecs “moins pires” que d’autres, des mecs qui ne violent pas, qui ne battent pas etc, personne ne dit le contraire. Mais oui nous sommes en colère face à l’injustice de ce qu’est notre place au sein de la société. Et surtout, il ne faut pas oublier que la misandrie ne tue pas contrairement à la misogynie et que comme le rappelle Pauline Harmange dans ce livre, l’une est en réaction de l’autre…. Comprendre, le jour où la misogynie cesse, la misandrie n’aura plus aucune raison d’exister. Et cette colère, puisque nous avons appris dès toute petite qu’elle n’était pas “jolie” dans la bouche d’une femme, nous avons aussi appris à la réfréner, la cacher, l’oublier et la laisser s’imprimer dans nos blessures psycho-somatiques… dans nos corps. Et puisque la société nous rappelle tous les jours que nous sommes avant tout soit des objets sexuels, soit des mères, que nous devons être sexuelles, sensuelles, gentilles mais pas trop, assertives mais pas trop (…) que nous devons être belles, nourrir, et faire les deux à la perfection sans jamais prendre en compte la complexité et la pluralité de nos personnalités, de nos corps, de nos intentions, de nos sexualités, de nos background… Alors c’est aussi dans l’alimentation que nous nous battons contre notre colère, que nous essayons de la faire disparaître en nous interdisant de manger, de l’enfouir en nous “gavant” de nourriture ou encore de la contrôler en calculant chaque calorie qui rentre dans notre bouche. Anorexie, boulimie, orthorexie… autant de maladies qui ont pour source la violence de notre société patriarcale et des trauma qu’elle nous impose. Mais les troubles du comportement alimentaire ne se résument pas à ces trois maladies qui en représentent les effets les plus stigmatisable, ils sont un spectre de comportements complexes liés à une intégration dès l’enfance de violences subis dont les femmes (plurielles) restent majoritairement les grandes victimes*.
Et de nouveau, ceci est un résumé bien insuffisant par rapport à la complexité que représentent les troubles du comportement alimentaire qui sont profondément multi facteurs mais disons que c’est un axe absolument valide qu’il faut commencer à prendre en compte à ce sujet pour sortir de la culpabilité dans le rapport à la nourriture… Nous y reviendrons très bientôt.
Alors je vais finir ce premier article engagé comme Pauline Harmange finit son livre
“Femmes rassemblons-nous : nos forces conjuguées sont redoutables et redoutées. Je crois qu’il ne faut plus avoir peur de dire et de vivre nos misandries. Détester les hommes et tout ce qu’ils représentent (le système dont je vous parlais) est notre droit le plus strict. C’est aussi une fête. Qui aurait cru qu’il y aurait autant de joie dans la misandrie ? Cet état d’esprit ne nous rend ni aigries ni esseulées, contrairement à ce que la société patriarcale veut nous faire croire. Je crois que la détestation des hommes nous ouvre les portes de l’amour pour les femmes (et pour nous-mêmes) sous toutes les formes que cela peut prendre. Et qu’on a besoin de cet amour – de cette sorrorité – pour nous libérer (de nos blessures)”
“moi les hommes je les déteste” – Pauline Harmange aux éditions monstrograph
Mais par où commencer ?
Si je n’ai qu’une poignée de conseils à vous donner, qui seront les sujets que nous aborderons si vous venez en consultation ou encore dans le prochain workshop en ligne, soyez vous-mêmes, vivez/vibrez vos émotions, prenez soin de vous, acceptez qu’il soit difficile de s’aimer dans une société qui nous apprend à nous détester et faites lui la “nique” à cette société. N’hésitez jamais à apprendre chaque jour à vous aimer “un peu plus qu’hier et un peu moins que demain” parce que vous le valez bien, parce que vous le méritez bien et parce que jamais personne ne fera ça mieux que vous. Aimez-vous dans votre totalité, dans vos défauts et dans vos faiblesses, dans vos réussites et vos échecs si vous y arrivez et embrassez ce qu’on a essayé de vous faire passer pour des émotions négatives toute votre vie si vous y arrivez aussi… Et si vous n’y arrivez pas, c’est absolument ok aussi et ce n’est pas de votre faute.
Soyez flamboyantes, soyez colériques, hystériques, mal à propos, désordonnées, compliquées, inefficaces, inappropriées, obstinées, émotives si le coeur vous en dit… ou ne le soyez pas si le coeur vous en dit aussi, car le but de cette liberté si recherchée c’est en fait d’avoir le choix, constamment le choix… Tous les choix. Car non “trop de choix ne tue pas le choix” comme on essaye de nous le faire croire, “trop de choix” est un signe d’une société en bonne santé, inclusive, ouverte et qui permet à chacun.e de trouver sa propre voie en embrassant l’entière complexité de sa personnalité au fur et à mesure de ses apprentissages.
Et surtout n’écoutez pas mes conseils, ni ceux des autres, qui suis-je et qui sont ces gens pour prétendre vous dire qui vous devez être !